Une plume au service de l’action associative
M. Mohammed Adib Slaoui, auteur du livre «Les enfants de la pauvreté« (ouvrage en arabe qui coûte 50 DH), est journaliste et membre actif de l’Association marocaine d’aide aux enfants en situation précaire. Il a réservé les bénéfices des ventes de son ouvrage pour le soutien des différentes actions de l’association. «Les enfants de la pauvreté« fait partie d’une série de publications à caractère social. Après avoir consacré sa plume au traitement de problèmes culturels, littéraires et artistiques au Maroc, Adib Slaoui s’est attaqué aux dossiers sociaux qu’il a entamés avec une étude sur la drogue et une autre sur la corruption avant d’enchaîner sur les enfants de la rue. Le prochain ouvrage sera consacré à la problématique du pouvoir et les défis de la transition. «Les enfants de la pauvreté« se penche sur le phénomène des enfants de la rue, des enfants abandonnés et ceux de l’exode rural en s’arrêtant sur leurs problèmes en matière d’éducation, d’enseignement et d’intégration sociale. Dans son ouvrage «Les enfants de la pauvreté«, Mohammed Adib Slaoui tente de faire l’autopsie du phénomène des enfants de la rue et d’y proposer des remèdes. Entretien:- L’Economiste: Quelle est la démarche que vous avez adoptée pour écrire votre livre? – M. Mohammed Adib Slaoui: «Les enfants de la pauvreté« expose des théories et des idées recueillies auprès d’acteurs de la société civile, de chercheurs, de sociologues et spécialistes de l’éducation qui m’ont proposé des solutions. Je me suis également inspiré des expériences des autres pays d’Europe et d’Amérique latine, parce que le phénomène de pauvreté n’est pas spécifique au Maroc, mais en insistant particulièrement sur les thèses scientifiques effectuées par des chercheurs dans les universités marocaines. – Est-ce que vous avez fait des enquêtes sur le terrain? – Le livre est un ensemble de thèses sur les acteurs de la société civile qui s’étalent sur 20 ans. On y trouve leurs déclarations et théories. C’est aussi un travail de terrain. J’ai été en contact avec les enfants de la rue.- Et que demandent ces enfants? – Les enfants cherchent à avoir une présence effective, une entité propre au sien de la société. Ils sentent que la société les rejette alors qu’ils demandent sa reconnaissance. Le rôle des associations est justement de leur donner cette reconnaissance et de leur faire sentir qu’ils ont des droits et des devoirs.- Quelle conclusion en avez-vous tirée? – La société civile et les associations sont les seules à pouvoir pallier ce phénomène. L’enfant de la campagne est privé de ses moindres droits. Il vit dans la pauvreté et l’analphabétisme. 90% des enfants de la rue viennent du monde rural. La solution de ce phénomène est tributaire de deux choses. En premier lieu, il faudrait élaborer une stratégie pour sauver la campagne. Prenons l’exemple des enfants scolarisés, ils désertent les classes parce que les manuels scolaires ne sont pas adaptés à leur vie rurale. En second lieu, il faut donner les moyens aux acteurs de la société civile pour qu’ils puissent jouer un rôle plus efficace. – Et l’Etat dans tout ça?- L’Etat propose des solutions qui ne sont pas applicables. Cela fait trente ans que nous attendons qu’elles se concrétisent alors que les problèmes s’aggravent. Ce que je demande dans le livre, c’est que l’Etat favorise le développement de ces associations en les soutenant matériellement et moralement.- Que pensez-vous du travail des associations au Maroc?- Il existe trois sortes d’association au Maroc. Vous avez celles qui travaillent sur le terrain, celles qui restent dans des bureaux et enfin celles qui ne dépassent pas le stade des réflexions théoriques. Elles sont aussi importantes les unes que les autres. Mais avec l’ampleur du phénomène des enfants de la rue, nous avons plus besoin de celles qui travaillent sur le terrain. Malheureusement, elles ne sont pas légion. Par exemple, l’Association marocaine d’aide aux enfants en situation précaire (AMESIP) recueille des enfants de la rue pour les remettre au sein de leur famille. Elle aide l’enfant et la famille à rester ensemble. Ce qui demande beaucoup de moyens humains et matériels. C’est un vrai combat dont l’arme véritable reste la sensibilisation. Mon livre s’inscrit dans cette démarche. Il est une invitation à élargir le champ de manoeuvre de la société civile.- Quel rôle peuvent jouer les médias dans ce combat?- Le tapage médiatique dans le travail associatif est très important pour la simple raison qu’il permet communication et sensibilisation. On travaille dans le silence quand il s’agit d’un petit problème, mais quand il s’agit d’un scandale -sur 30 millions de personnes, 2 millions sont sans foyer-, il faut faire un travail de sensibilisation pour que chacun assume ses responsabilités. Ces enfants, nous les voyons dans la rue, ils nous font pitié, mais nous ne savons pas combien ils sont. Les chiffres sont catastrophiques et c’est aux médias de les communiquer.